András Petöcz:

La métaphore d'Europe

 

1.

 

Elle pirouette, fait un tour, un second, s'offre

aux regards, sourit, puis rit, tour encore et re-tour,

pirouette, main légère qui s'envole, troublant re-

tour, main encore, promesse, puis retrait, sévère

et froid, elle fait volte-face et s'éloigne, le désespoir

t'empoigne, au même instant, retour, de son regard,

par hasard, inaperçu, inavoué, regard vaste,

qui s'étend, elle rit, offre son rire, son bonheur

à ton seul regard, émerveillé, désemparé,

elle est lointaine et splendide, splendide

à ton regard, et lointaine, elle te sourit, penche

la tête, une mèche ou deux dans les yeux, réelle

et incroyable, invraisemblable et splendide, elle te

désempare, splendide et lointaine à ton regard.

 

2.

 

 

Elle a tendance à se recroqueviller parfois. En boule dans son lit,

la tête nichée dans l'oreiller, elle flaire l'air, flemmarde,

fredonne, sans réagir à ta présence, disparaît

presque sous la couette, "extinction des feux!" tu claironnes

en vain, elle rigole, hurle si tu bouges, puis éclate

de rire, fait le guignol, se moque de toi, se moque du monde,

tu attends que la moutarde te monte au nez, en vain, tu ris,

heureux, avec elle, impossible au temps qui passe, le temps

qui passe est impossible ; gracieuse et généreuse

elle te laisse prendre sa main si menue dans ta main ;

tu le sens légère, comme toi, dis-tu, elle est si légère,

ta façon de bouger, comme un vol d'oiseau, dis-tu, elle est si légère,

ta façon de bouger, comme un vol d'oiseau, comme un corps

qui respire ; pesant et comme un souffle, pesant et plume.

 

 

3.

 

Elle saurait être ta course, ton galop le plus effréné. Interloqué,

tu observes tes mouvements. Dans un pré lumineux, elle saurait être ta

course, effréné, entre buissons et fourrés,

ton intense cavalcade, ton essoufflade, ton essoufflade,

ton assoiffade, ton élan pris et perdu, ton départ,

ton retard, ton souffle repris et rendu, ton inconditionnelle reddition

intérieure, ton désespoir aux poings crispés,

ta course et ta galopade, ta chute du haut d'un rocher ;

elle saurait être ta souffrance et ta mort. Tu ralentis

tes mouvements. Tu remplis tes poumons

d'air frais, souris au souvenir de ta course,

de ta galopade. Tu as rempli tes poumons

d'air frais, plus rien ne peut t'arriver, le calme

qui te remplit est infini, infini est le calme qui te remplit.

 

(Adaptation française : Kinga Dornacher)